Pendant mon enfance, il m’a été diagnostiqué une maladie de Klippel Trenaunay, maladie vasculaire extrêmement grave qui se définit par l'association de trois symptômes : un angiome, une hypertrophie du membre, et des varices. Elle est évolutive et peut conduire à l’amputation, l’embolie pulmonaire…
De fait, il a été préconisé, des embolisations régulières et rapprochées pour traiter l'anomalie vasculaire et éviter qu’elle n’évolue défavorablement. (l’embolisation est une procédure qui sert à injecter dans le vaisseau anormal en passant le plus souvent par l’artère fémorale (aine) ou humérale (bras) un produit pour former une thrombose de ce vaisseau (le fermer) et donc arrêter ou prévenir un saignement)
Au total, enfant, j’ai subi 9 examens artériographiques, dont 7 ont comporté une embolisation, c'est-à-dire à peu près une par an.
L’artériographie avec embolisation de 1992 a donné lieu à une complication qui a entraîné mon transfert en soins intensifs, en raison d’une ischémie sub aiguë du pied.
Ensuite, je n’ai plus voulu subir d’artériographie annuelle jusqu’en 2002.
Puis le 13 novembre 2006, mon chirurgien vasculaire m’a fortement conseillé de me livrer à une nouvelle intervention d'embolisation, réalisée par le Docteur B, radiologue interventionnel..
Le Docteur B a complété son injection à l’aide de micro particules par l’injection de Trombovar, produit sclérosant alors même que la note explicative qui accompagne l’autorisation de mise sur le marché en France de ce produit mentionne :
« Voie intraveineuse stricte,
Contre-indications : injection intra artérielle,
toute injection en dehors d’une veine peut provoquer une nécrose grave,
une injection intra artérielle est particulièrement grave et peut avoir pour conséquence la nécessité d’une amputation »
Je me suis réveillée au cours de la procédure en raison d'une douleur très violente au niveau du genou gauche, siège de la malformation. J’ai constaté alors une modification de la coloration cutanée dans la région de la malformation vasculaire (peau bleue foncé, violette...), avec paralysie nerveuse étendue.
Verdict : syndrôme des loges qui se définit par l’ischémie musculaire provoquée par une augmentation anormale du volume du muscle au sein de la loge musculaire. Ce conflit entre contenant trop étroit et contenu trop volumineux provoque des dégâts irréversibles et nécessite une aponévrotomie, intervention chirurgicale qui consiste dans l'ablation de la membrane fibreuse qui entoure les masses musculaires et les sépare des unes des autres.
J’ai du subir 2 nouvelles interventions chirurgicales à visée esthétique suite à la nécrose cutanée: exérèse cutanée puis greffe.
Je suis restée hospitalisée durant 5 mois, avec pansements tous les jours. J’ai ensuite passé 4 mois en centre de rééducation.
J’ai été en arrêt de travail durant 3 ans !
Nous avons engagé une procédure qui a donné lieu à une expertise judiciaire.
Les experts désignés judiciairement ont retenu :
- D’une part que je n’avais jamais été porteuse de la maladie de Klippel Trenaunay, que je ne présentais pas les symptômes, et que j’avais ainsi subi une intervention chirurgicale chaque année, sans la moindre justification ni nécessité. Que j’avais passé ma vie dans la croyance d’être atteinte d’une pathologie évolutive très grave qui m’avait empêché de mener une vie normale.
- D’autre part que l'intervention de novembre 2006 reposait sur une indication thérapeutique non justifiée et a consisté en une méthode inhabituelle et non recommandée, au mépris de l'évaluation du ratio bénéfice/risque qu'était en droit d'attendre la patiente, et sans que cette dernière ait été informée des risques encourus.
En janvier 2012 j’ai obtenu satisfaction devant le Tribunal et été indemnisée dans des conditions satisfaisante.